Titres à choix multiples
Question horaire, la Patagonie australe c'est un véritable marathon. Entre les très longues distances à parcourrir et les heures voire les nuits d'attentes dans les gares routières, il m'a fallu pas moins de 54 heures pour rejoindre depuis El Bolsón, ville limitrophe des provinces Río Negro et Chubut, El Clafate emblème de la plus grande province de la patagonie, Santa Cruz où j'ai passé 3 jours totalement vertigineux. J'ouvre une petite parathèse : pour tous ceux qui trouvaient terriblement injuste que je puisse passer un an au soleil et au chaud, qu'ils soient pleinement rassurés, même en été, la patagonie et ses vents secs et violents te font goûter à la morsure intemporelle du froid polaire. Ici se referme la parathèse et commence l'hallucination.
D'un côté la Nature dans toute sa grandeur et sa puissance et de l'autre nous autre petites brindilles de rien du tout. De cette démesure naissent légendes et bestiaire fantastique. Le monstre "Glacier Perito Moreno" gronde très exactement comme son frère le Tonnerre. Une rivière de glace, gigantesque, haute de quelques 400 mètres au dessus du niveau du lac, craque en permanence. On entend les déchirements internes de la bête et brusquement un craquement sonore plus fort, beaucoup plus fort, retentit et mobilise en un instant des centaines de spectateurs, à l'affût, qui scrutent attentivement de droite à gauche le glacier, balayant du regard l'immense et imposante paroi de glace. Une poignée de secondes, voilà tout, un brin de confusion quand différents rugissements se sont fait entendre successivement ou que se sont glissés des grincements intermédiaires dans le court intervalle qui sépare le tonnerre de la chute, et le spectacle peut commencer. Il n'y a pas la foudre, mais ça tombe. Comme toujours il y a les faux espoirs et les vraies bonnes surprises, comme toujours il y a les petits gains et les gros lots. Aussi souvent de petits "cailloux" se décrochent entraînant dans leur chute un peu de poudreuse mais parfois un immeuble de glace s'effondre dans un grondement sec et retentissant, dégageant un volumineux nuage blanc que le lac maléable engloutit presque sans l'ombre d'un bruit. L'instant d'après, un partie du monstre a disparu dans les profondeurs, une soupe laiteuse se répand lentement à la surface et, avec quelque chose de triste à la vue de cette destruction, le silence revient le temps que reprennent leur souffle et le glacier et le spectateur. Suite du vertige, la patagonie offre aux yeux émerveillés une symphonie de couleurs où le bleu est chef d'orchestre. Ici, je resterai économe, les photos parlent d'elles-même.
Vous avez demandé un cours de glaciologie? Ne quittez pas : La neige tombe, se comprime et se transforme en glace. Sous l'effet du poids, le glacier glisse vers l'aval - je vous fais grâce des détails du glissement. Les déplacements successifs provoquent fissures et crevaces. La glace, compressée sous son propre poids, ne laisse sortir du spectre lumineux que les rayons de courtes longueurs d'onde et apparaît ainsi de couleur bleue. Lorsque le glacier fond, des icebergs de glace se détachent et entraînent dans leur chute de la "farine glaciaire" qui donne aux lacs cette caractéristique coloration grisâtre. Les sédiments ne se déposent pas tous au fond, certains demeurent à la surface et diffractent la lumière du soleil tintant de sublimes nuances turquoises les eaux des lacs et rivières. Il est vrai que le bleu se taille la plus belle part du gâteau mais se serait un peu vite oublier les autres magnifiques couleurs qui le mettent tant en valeur. Citons les verts ardents des forêts couvrant certains versants, les jaunes pailles époustouflants ou pour ceux qui donnent dans la coloration capillaire, les blonds cendrés aveuglants ainsi que les ocres et les roux aux reflets rosés, pourpres, violets ou orangés qui tapissent les steppes brûlés de la pampa patagonienne et dont on pourrait dire, que quelle que soit la saison, c'est l'automne à même le sol. Pictural.
Dernier jour à El Calafate, la ville est en effervescence car elle fête les 130 ans du lago argentino, le plus grand lac d'argentine. De quoi il retourne exactement, je l'ignore, mais les meilleurs groupes de musique des environs se succèdent et surtout, surtout, ce fut l'occasion d'assister au festival de Doma, rodéo de gauchos sur leur monture, à grand renfort de bière et de choripan. Les chevaux sont splendides, les casse-geule aussi. Tout le folklore argentin sous les bannières de la Nation ... Bleu, Blanc,...Bleu.
Un dernier mot : un grand merci à Esther, l'espagnole délire avec qui je me suis tapé des barres de rire sur la façon dont les argentins ont de dire "de rien" ou "je t'en prie" qui sonne comique à nos oreilles puisqu'ils semblent à chaque fois s'offusquer d'un "pero por favor" comme si, quelle que fût la raison pour laquelle tu les remerciais, tu les avais offensé rien qu'en le disant.
En conclusion, au choix, 4 titres :
- Patagonia austral, c'est d'la balle
- Hielo azul, bárbaro
- Gaucho in the Pampa, amazing cowboy
- Muchísimas gracias....pero por favor!